LA PROFESSION D'AVOCAT: ENTRE OPPORTUNITES D'EMPLOI ET BLOCAGES

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LA PROFESSION D'AVOCAT: ENTRE OPPORTUNITES D'EMPLOI ET BLOCAGES

La profession d’avocat : entre opportunités d’emploi et blocages pour l’avènement d’un Etat de droit

Aujourd’hui, la situation du chômage est devenue très préoccupante au Sénégal. S’il est vrai que ce constat touche toutes les couches de la population et des corps de métiers, l’émergence de solutions appropriées doit être menée par des approches volontariste, réaliste et ayant comme finalité de contribuer à l’utilité publique. Ainsi, nous venons faire au Gouvernement du Sénégal – intéressé par la résolution du chômage des jeunes – des propositions judicieuses et socialement bénéfiques.

  • La première proposition vise une réforme du Barreau pour permettre de répondre au déficit d’avocats. Nous avons un déficit dans ce domaine. Actuellement, le nombre d’avocats au Sénégal est de 364 avocats pour 13 millions de sénégalais. Ce qui équivaut à 1 avocat pour 36000 sénégalais.

A titre d’exemple, en France on a au 1er janvier 2012, 56 176 avocats, soit un avocat pour 1300 habitants. Les espagnols disposent d’un avocat pour 395 personnes, la France étant au cinquième rang européen derrière les allemands, les italiens et les britanniques. Le phénomène est encore plus fort aux Etats-Unis, où on dénombre plus de 1 143 358 avocats soit 1 avocat pour 265 habitants.

► Sur les 364 avocats du Barreau du Sénégal, seuls 26 avocats sont établis dans les régions. Soit 7,14%. Dakar concentre les 338 avocats sur les 364avocats.

Thiès: 10

Saint Louis: 7

Kaolack: 3

Ziguinchor : 3

Diourbel: 1

Louga: 1

Kolda: 1

Fatick : 0

6 régions n’ont pas de cabinets d’avocats.

Ces populations ne sont-elles pas des sénégalais ? N’ont-elles pas droit à un accès facile aux services de la justice sénégalaise ?

Kaffrine: 0

Matam: 0

Tambacounda: 0

Kédougou: 0

Sédhiou: 0

Au regard de ce tableau illustratif, la question est de savoir pourquoi ce déficit alors que l’UCAD seule produit chaque année en moyenne 300 maitrisards en droit, nombre auquel il faut ajouter ceux qui sortent de l’UGB, des CUR, des écoles étrangères en sus des Doctorants.

La raison principale est que le barreau a des intérêts commerciaux à protéger. Le barreau est formé par les avocats exerçant la profession. Ils n’ont pas intérêt à élargir la profession. Malheureusement, l’Etat du Sénégal leur a confié l’organisation de l’examen pour accéder à la profession d’avocat. Il y a un flagrant conflit d’intérêt. Il faut nécessairement une réforme pour corriger cela.

Cette réforme s’impose au regard des griefs sur l’organisation du concours du Barreau.

  1. D’abord la loi scélérate de 2009 (loi 2009-25 du 08 juillet 2009) portant modification de la loi n°84-09 du 04 janvier 1984 a introduit une condition contestable qui est la limitation de l’âge d’accès à la profession d’avocat qui est de 40 ans. Une profession libérale ne s’accommode pas de telles restrictions, contraires à la liberté d’entreprendre et au Droit à la justice pour tout citoyen sans distinction. Pourquoi un Doctorant en droit ou même un Professeur agrégé de droit ne peut pas devenir avocat au Sénégal ? C’est une hérésie.
  2. Le faible taux d’admission (11 dont 10 provenant des cabinets d’avocats pour la dernière session) ;
  3. On demande un CV dans un concours administratif. C’est une anomalie à corriger impérativement d’autant plus que cela leur permet de savoir qui a effectué un stage dans tel ou tel cabinet d’avocat.
  4. La divulgation du nom du candidat au correcteur par la non-exigence du collage de la souche portant nom du candidat. Ce qui ne permet pas de préserver l’anonymat du candidat ;
  5. Le choix des correcteurs émanant quasi exclusivement de la profession (un professeur et deux magistrats y sont seulement associés);
  6. L’organisation du concours une fois tous les 3 ans; comme si nous n’avons pas de déficit dans ce domaine (cf. tableau ci-dessus). Noter que les avocats ne sont pas des fonctionnaires.
  7. La durée de la correction des épreuves est suspecte (12 mois là où l’ENA fait 2 mois avec environ 10 fois plus de copies).

Ainsi, un sentiment de profonde injustice habite légitimement tous les professionnels et diplômés du droit pour qui ces portes sont fermées par un Barreau guidé par ses propres intérêts commerciaux.

Pour l’équité et la justice dont se réclament tous les professionnels du droit, nous demandons solennellement à l’Etat du Sénégal de prendre ses responsabilités en reprenant l’organisation du concours. Même si nous nous limitons pour l’instant au barreau, il devrait en être de même pour toutes les professions libérales : Notariat, Huissier de justice, Commissaire-priseur, expertise comptable.

L’essentiel est d’avoir les qualités. Rien n’est plus légitime pour nous de poser cette problématique dans un Etat de Droit. Nous devons tous continuer à ancrer cet Etat de droit qui est un état dans lequel le droit est le seul moyen pour résoudre les conflits entre citoyens et entre gouvernants et gouvernés. Cela suppose évidemment l’accessibilité du droit et de ses services à tous les citoyens sans exception.

Cela dit, nous informerons qui de droit avant d’engager une bataille féroce pour que cette réforme ait lieu. Nous commencerons par une pétition.

Notre deuxième proposition est d’introduire l’enseignement du droit et de l’économie dans les lycées et collèges pour inculquer aux élèves les notions fondamentales et pratiques.

Ces deux propositions, considérées ensemble comportent des avantages majeurs pour les populations et l’Etat :

  1. La sensibilisation et l’information de tous les citoyens sur leurs droits et devoirs. Car nul n’est censé ignorer la loi. C’est un principe fondamental qui ne connait pas de dérogation. Nous proposons l’introduction de l’enseignement du Droit dans les collèges et lycées afin de former une jeunesse plus citoyenne et plus encline au respect des Droits et Libertés fondamentaux ;
  2. La possibilité pour tout citoyen sénégalais d’avoir accès aux auxiliaires de la justice, principalement aux avocats. Cela suppose évidemment qu’ils soient disponibles de manière suffisante sur l’étendue du territoire national avec des honoraires supportables pour le citoyen sénégalais. Il est donc impératif de briser la limitation arbitraire implosée par les avocats. L’Etat du Sénégal doit assumer un rôle impartial et de responsabilité en prenant en charge l’organisation des concours et examens des professions libérales afin d’éviter que les ordres soient juges et parties. Cela aura pour avantages :
  3. Tous les jeunes qui sortent de l’école sont sensibilisés et deviennent des citoyens plus responsables ;
  4. Comme n’importe quel secteur privé, la concurrence est aussi bénéfique pour les professions libérales ;
  5. La diminution du chômage des jeunes diplômés (plus de 2500 maîtrisards et doctorants en Droit) et de l’occupation des jeunes (bras vigoureux) contribueront à la croissance économique.
  6. L’administration judiciaire y gagne car avec plus d’avocats, les dossiers sont traités plus rapidement ;
  7. Enfin les Facultés de Droit et des Sciences Economiques y gagnent car elles font partie des plus grandes Facultés des Universités du pays et, où beaucoup d’argent est injecté. Si les promotions qui sortent chaque année de ces Facultés se retrouvent à la rue, elles risquent fort bien de perdre tout crédit.

Certains avocats du Barreau se sentiront, à coup sûr, menacés et s’offusqueront pour s’opposer à une telle mesure. Mais au-delà de tout lobby corporatiste, de tout intérêt commercial, l’Etat doit assumer ses responsabilités dans le sens de l’intérêt public.

Dakar, le 03 juin 2013

Regroupement des Diplômés Sans Emploi du Sénégal - (R.D.S.E.S)/ Récépissé n°15229 / MINT/DAGAT/DEL/AS

Contacts : 776123321 / 774200394/

Courriel : rdses2013@yahoo.fr

A Madame Aminata TOURE

Garde des Sceaux, Ministre de la Justice

OBJET : Demande d’audience

Madame le Ministre,

Le Regroupement des Diplômés Sans Emploi du Sénégal, membre de la Coalition Nationale pour l’Emploi, vous prie de bien vouloir lui accorder une audience afin qu’il puisse échanger avec vous sur la situation des professions libérales dans notre pays (Barreau, Notariat, Huissier de justice, Commissaire priseur).

Notre regroupement compte plus de 3500 diplômés (maitrisards et doctorants). Ces jeunes diplômés souhaitent que l’Etat du Sénégal reprenne l’organisation des examens et concours donnant accès aux professions libérales notamment le Barreau.

Cette demande est légitime au regard du faible nombre d’avocats (364 pour 13 millions de sénégalais) et de la répartition déséquilibrée des avocats sur le territoire national (338 avocats pour Dakar, 27 pour le reste des régions dont 6 régions qui n’ont même pas d’avocats).

Nous estimons aussi que l’accessibilité de la justice requiert la disponibilité d’un nombre d’avocats suffisants pour leur fournir l’assistance nécessaire à leurs démarches avec le système judiciaire. Aussi, les réformes en gestation dans votre ministère vont dans le sens d’une assistance aux prévenus dès les premières heures d’interpellation.

L’élargissement de la profession aura aussi un impact sur la résorption du chômage des jeunes diplômés.

Autant de raisons qui nous laissent espérer que nous sommes en phase avec la politique menée par votre département.

Dans l’attente d’une suite favorable à notre requête, nous vous exprimons, Madame le Ministre, l’assurance de notre haute considération.

M. BabacarNdour/Coordonnateur du RDSES

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C'est tout à fait des informations utiles et bien rédigé afin de bien comprendre sur le métier d'avocat. De plus, cet article est tout à fait clair et bien compréhensible!
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